Quand l’Independant à Londres écrit : « la fraude est une affaire d’habitude dans la politique française » et conclut son article de la manière suivante : « la vérité est que ce genre de scandale est tout à fait normal en France c’est aussi une des principales raisons pour lesquelles sa classe politique est si inefficace … la facilité avec laquelle les représentants élus peuvent ignorer des accusations bien documentées selon lesquels ils remplissent leurs poches de fonds publics n’a rien de fantastique en France », nous devrions nous poser des questions.
Alors que le dernier classement de Transparency International nous fait reculer dans l’indice de perception de la corruption, malgré les efforts notables de la Haute autorité, nous devrions poser des questions. Le sujet est évidemment éthique car on ne peut se prétendre patrie des droits de l’homme et avoir constamment à la bouche le terme d’exemplarité et admettre des scandales à répétition. Mais le sujet est aussi économique. Est-ce un hasard si les pays les plus vertueux et en particulier ceux d’Europe du Nord sont ceux qui enregistrent les taux de chômage les plus bas, le système démocratique le plus évolué, et l’équilibre sociétal et social le meilleur. L’affaire Fillon, indépendamment même des conséquences judiciaires qu’elle pourrait avoir, ou ne pas avoir (mais, compte tenu des éléments qui ont été rendus publics, cette situation ne ferait pas cesser l’incendie) est une fois de plus l’illustration de la particularité hexagonale d’une forme de mépris avec lequel les fonds publics sont traités par ceux qui devraient en être les plus scrupuleux contrôleurs.
C’est la raison pour laquelle le droit d’employer des proches comme celui de n’avoir pas à justifier des frais de représentation ne sont plus acceptables dans un système démocratique et n’existent du reste pas chez nos voisins et au niveau européen. C’est du reste la raison pour laquelle Marine Le Pen et son père doivent rembourser pour aujourd’hui la coquette somme qui s’élève à plus de 300000€ aux institutions européennes pour avoir fait financer sur des enveloppes d’ attachés parlementaires des personnes qui remplissaient une toute autre fonction sans rapport avec le Parlement européen.
Quand nos responsables politiques se gargarisent de la grandeur de la France, de sa place dans le monde, de son rôle de cinquième puissance économique, de sa place au conseil de sécurité, ils seraient bien inspirés de faire de la probité une vertu cardinale de notre démocratie et nous en sommes bien loin. Entre Françafrique et élus ripoux que la justice entreprend enfin de condamner réellement, nous avons bien du travail pour reconquérir une place enviable dans le classement des démocraties rigoureuses. Mais, si les politiques se comportent de la sorte, c’est aussi que les électeurs ne sanctionnent que très rarement leurs élus corrompus. Les réélections triomphales d’ élus condamnés ou poursuivis avec de lourdes charges (même si bien évidemment le principe de présomption d’innocence existe) sont légion.
Plutôt que de se précipiter dans un « tous pourri » qui est inexact et fait le jeu du Front National (qui se trouve pourtant dans une situation tout à fait comparable à celles des autres partis politiques), les citoyens devraient exiger de nouvelles règles du jeu calquées tout simplement sur le système démocratique de nos voisins : au non-cumul des mandats devraient s’ajouter l’interdiction d’employer un membre de sa famille, le remboursement des frais de mission sur justificatifs pour les parlementaires, la réduction des frais de représentation pour les ministres et bien entendu l’impossibilité de se présenter à une élection sans casier judiciaire vierge (de même qu’on ne peut pas prétendre diriger une société sans casier judiciaire vierge).
Ces mesures simples sont indispensables pour entrer sur la voie d’une reconquête de notre image sur le plan international.