Accueillir un nouveau à distance : Les défis de l’onboarding à l’ère du Covid | La lettre de Toulouse | Scoop.it

En ces temps de télétravail généralisé, l’onboarding peut être compliqué. Comment permettre à un nouveau collaborateur de se sentir intégré, quand son arrivée se déroule surtout à distance ? Vincent Binetruy, directeur France du Top Employers Institute, et Marie-Vanessa Florentin, responsable de la division RH de Robert Walters, nous apportent leur éclairage.

33 % des cadres ont démissionné à cause d’une mauvaise intégration en 2019. Alors que presque tout se fait à distance, quels défis se posent pour les employeurs, les DRH et les managers ?

VB : Il est important de soigner la phase d’intégration d’un nouveau salarié, pour plusieurs raisons. D’abord parce que la première impression pèse sur l’engagement ; y compris quand l’entreprise se montre vraiment comme elle est une fois le recrutement terminé. 20 % des nouveaux embauchés en CDI partent en période d’essai, de leur propre initiative. Ensuite, car les nouvelles recrues ont tendance à coopter leurs réseaux quand leurs premiers pas dans l’organisation se passent bien : ils deviennent des ambassadeurs de leur entreprise. Enfin, car l’intégration permet, quand elle est bien faite, de rendre le collaborateur deux fois plus performant.

 

M-V F : Depuis les débuts de la crise, il s’agit d’un véritable défi pour les DRH et les managers. Que le collaborateur soit en full remote ou qu’il vienne dans les locaux une fois par semaine, la distanciation sociale est clairement un frein à son intégration. Les rencontres et les échanges informels, importants pour le fidéliser, sont par exemple largement freinés. L’onboarding actuel nécessite d’utiliser des techniques (éprouvées depuis un an) pour tisser un sentiment d’appartenance et augmenter les échanges, malgré la distance imposée par la crise.

 

Justement, quelles méthodes mettre en place pour créer du lien malgré la distance ?

VB : À distance, il est important de créer du lien avec le candidat avant même son arrivée : cette période de préavis peut durer plusieurs semaines, durant lesquelles il peut changer d’avis. Nombre d’entreprises font donc de la pré-intégration. Pour cela, il existe des plate-formes dédiées, qui permettent de toucher du doigt sa nouvelle entreprise. Par exemple en visitant les bureaux virtuellement, ou en visionnant des vidéos de présentation des futurs collègues.

Une autre pratique à mobiliser, c’est le “parrainage”. Un peu tombé en désuétude, il a fait son retour avec la crise. Il permet au collaborateur de s’appuyer sur un “tuteur” bienveillant, qui le conseillera et le mettra plus facilement en relation avec chacun. Mais l’implication de la hiérarchie reste clé ; de la rencontre avec les dirigeants (lors de cafés virtuels) à l’accompagnement (au quotidien) par les managers. Enfin, il faudra mesurer la satisfaction du nouvel embauché, au travers d’une enquête détaillée. Lors de son arrivée et plusieurs mois après. Afin d’améliorer le processus ensuite.

 

M-V F : Le jour 1 ne sera réussi que si le candidat a déjà été mis en relation avec son équipe. Il faut faire en sorte qu’il ait déjà l’impression d’en faire partie. Le manager et le DRH doivent garder un lien visuel, ou par téléphone, avec lui. L’appeler régulièrement, lui parler de l’entreprise. Et lui faire comprendre qu’on l’attend. En raison de la crise, l’intégration se fera ensuite essentiellement hors du bureau. Les moments d’échange virtuels, entre le nouveau collaborateur et son manager, ou son “parrain”, doivent être excessivement cadencés, calés dans les plannings. On peut aussi augmenter le nombre de visioconférences, pendant lesquelles il sera mis en contact avec l’équipe.

 

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Mais comment intégrer réellement le collaborateur dans son équipe, s’il ne croise que rarement ses collègues ?

VB : Actuellement, les bureaux sont presque vides : il est nécessaire d’organiser davantage d’échanges virtuels qu’en temps normal. Des échanges planifiés, mais pas forcément formels sur le fond : il peut très bien s’agir de discussions déconnectées du travail, de type cafés ou apéros virtuels. Le simple fait de l’instituer et de le sacraliser dans l’agenda de tout le monde, donne au collaborateur l’assurance qu’il pourra échanger avec tous ses collègues.

Aujourd’hui, il est difficile d’aller au-delà de ces événements virtuels, qui permettent de maintenir une relative cohésion d’équipe. Mais pour intégrer davantage une nouvelle recrue, il faut aussi le faire participer à des projets qui lui permettront d’échanger avec de nombreuses personnes. L’intégrer dans suffisamment d’activités collectives pour qu’il se sente membre de l’équipe.

 

M-V F : Même en full remote, on peut déjouer les pièges de l’isolement. En incitant le manager à échanger très fréquemment avec son nouveau collaborateur. En créant des “binômes” : pendant une semaine, il échangera avec tel collaborateur, puis avec un autre la semaine suivante. En organisant des apéros virtuels, des ateliers cuisine, et des moments d’échanges plus décontractés.

 

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Faut-il faire un travail de pédagogie auprès des collègues du nouvel arrivant, et les inciter à agir à leur niveau ?

M-V F : Le manager doit être très présent, mais l’équipe aussi. Les entreprises ont tout intérêt à rendre les autres collaborateurs actifs dans le processus d’onboarding. Elle ne peut pas se faire uniquement avec les RH, les managers et les “parrains”. Il est important d’expliquer à chacun comment il peut aider le nouvel embauché ; si besoin en les formant. Pas aux relations sociales, mais au rôle qu’ils peuvent jouer pour faire en sorte qu’un nouvel arrivant se sente bien dans sa nouvelle entreprise. Il peut juste s’agir de l’appeler une fois par semaine au téléphone ou en visio.

 

 

 

Fabien Soyez
Journaliste Web et Community Manager